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Publié par Scientifique

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Les antidépresseurs sont parfois inefficaces pour soigner les dépressions profondes et résistantes. Un anesthésiant, l'isoflurane, offre une piste intéressante.

Après de premiers travaux effectués au début des années 90 en Europe sans suite commerciale, une récente étude américaine relance la piste de l'utilisation d'anesthésiants dans la prise en charge de la dépression profonde. L'Isoflurane, utilisé habituellement pour l'entretien des anesthésies générales, se montrerait efficace dans le traitement des dépressions résistantes aux antidépresseurs, selon des travaux publiés le 26 juillet sur le site de la revue Plos One . La molécule offrirait ainsi une alternative intéressante au traitement actuel par électrochoc, certes efficace mais souffrant d'une image agressive.

Violence et douleur sont sans doute les deux qualificatifs que l'imaginaire collectif associe le plus souvent au traitement par électrochoc. Ce mythe est pourtant loin de refléter la réalité et l'électroconvulsivothérapie (ECT) est reconnue par le monde de la psychiatrie comme ayant fait ses preuves dans la lutte contre une souffrance bien plus réelle: la dépression profonde. Considérée jusqu'à présent comme le meilleur traitement dans les cas de dépressions sévères résistantes aux traitements médicamenteux par antidépresseurs, elle serait efficace dans 55 à 90 % des cas.

Aucune innovation depuis plus de dix ans

Mais l'ECT n'est pas exempt d'effets secondaires, pouvant entraîner des troubles de la mémoire, de la concentration, de l'attention et même une amnésie temporaire pendant la période de traitement.

«De plus, beaucoup de personnes imaginent à tort que l'ECT est douloureuse [en France ce traitement est effectué sous anesthésie depuis les années 70] et provoque des dommages au cerveau, entraînant une stigmatisation sociale qui fait que des millions de patients hésitent à recevoir le traitement», explique le professeur Weeks, psychiatre et chercheur à l'université de l'Utah. «Dans d'autres cas, et malgré le consensus international dont elle ne manque pas de faire l'objet, l'ECT n'est pas pratiquée, notamment en Allemagne, pour des raisons historiques évidentes, en raison de son image encore teintée de barbarisme», précise le Dr Franck Baylé, psychiatre à l'hôpital Saint-Anne et professeur à l'université Paris-Descartes.

Enfin, si la recherche sur les médicaments antidépresseurs est toujours active et a permis d'en améliorer sensiblement la tolérance et l'efficacité, il n'y a pas eu de découvertes significatives dans ce domaine depuis la fin des années 90, notamment concernant les résistances au traitement ou le délai d'apparition d'une amélioration, toujours de 6 à 8 semaines en moyenne.

Meilleures capacités cognitives

Dans ce contexte, l'Isoflurane pourrait s'avérer une alternative intéressante à l'ECT, selon les travaux du Pr Weeks. L'anesthésiant a été testé dans une étude pilote comparant vingt patients ayant reçu des électrochocs à huit patients ayant reçu de l'isoflurane. Les chercheurs ont ainsi constaté que les deux traitements permettaient une diminution significative des symptômes de dépression. Cependant, dans les suites immédiates du traitement, les patients sous ECT ont eu des troubles de la mémoire, de la fluidité verbale et de la vitesse de traitement l'information. Si ces effets secondaires se sont dissipés en quatre semaines, le rappel des événements de la vie personnelle est resté en-dessous des niveaux de pré-traitement après quatre semaines. Les patients soignés avec de l'isoflurane n'ont en revanche pas montré d'altération de leurs capacités cognitives, que se soit dans les suites immédiates du traitement ou 4 semaines plus tard, rapporte l'étude.

«Très peu d'études existent sur l'utilisation des anesthésiants dans le traitement de la dépression résistante aux antidépresseurs, mais l'isoflurane semble intéressante du fait de l'absence supposée d'effets secondaires latéraux», estime le Pr Franck Baylé. Ce qui n'est pas le cas d'un autre anesthésiant faisant également le cas d'études, la kétamine, connu pour être un stupéfiant puissant entraînant un risque de mésusage et dont l'efficacité à long terme semble moindre que celle de l'isoflurane.

«Si la piste de l'isoflurane est intéressante, des études de plus grande envergure sont indispensables», conclut le Pr Bayle. «Au-delà de ces recherches alternatives à un traitement, les électrochocs, qui a prouvé son efficacité, il me semblerait bien plus pertinent de chercher à réhabilité auprès du grand public l'image de l'électroconvulsivothérapie», commente de son côté le Dr Hélène Kourio, psychiatre à l'hôpital Saint-Anne.

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