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Publié par Scientifique

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L'eau n'avait pas encore atteint sa cote historique lorsque l'électricité s'est soudain interrompue. Par précaution, 72 heures avant que la Seine ne déborde, ERDF a décidé de mettre hors service plusieurs distributeurs. Les immeubles ont brusquement été plongés dans le noir et les familles, privées de tout. Il n'y a plus de lumière, plus d'ascenseurs, de chauffage, d'électroménager, d'ordinateurs. Une eau saumâtre coule des robinets. Les écoles ont fermé. Un tiers de Paris est dans le noir, des dizaines de quartiers dans l'eau. Des immeubles menacent de s'effondrer.

 

Malgré les appels de la préfecture à quitter la ville, peu de Parisiens sont partis et ils sont désormais pris au piège. Les gares sont inondées et les transports publics paralysés. Une partie du RER, la majorité du métro sont noyés. Les ponts sont impraticables, les rues, le périphérique ne sont pl

 

 

  • Galerie des bibliothèques - Ville de Paris - Jusqu'au 28 mars - 22, rue Malher - 75004 Paris - Du mardi au dimanche de 13 heures à 19 heures. Le Pavillon de l'Eau - Du 20 janvier au 17 avril - 77 avenue de Versailles - 75016 Paris - Du lundi au vendredi de 10 heures à 18 heures, les samedis de 11 heures à 19 heures. Le boulevard Saint-Germain. Paris, 1910. Bibliothèque historique de la Ville de Paris.
  • Le grand hall de la gare d'Orsay, Paris (VIIème arr.), 1910. Bibliothèque historique de la Ville de Paris.
  • Voiture dans laquelle se trouve un ministre se rendant au ministère. Paris, 1910. Photographie de World's graphic Press. Bibliothèque historique de la Ville de Paris.
 
 
   

 

Photographies, manuscrits et archives, cartes postales, presse illustrée, publicités  : une exposition, en 2010, à la Galerie des bibliothèques à Paris, présentait plus de 200 documents, pour la plupart inédits, issus majoritairement des collections de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris, qui témoignent de l'inondation de 1910 dans les rues de la capitale.
Le grand hall de la gare d'Orsay,
Paris 7e, 1910. Bibliothèque historique de la Ville de Paris.

 

Crédits : © BHVP - Roger-Viollet

 

 

us accessibles, de même qu'une partie des autoroutes. L'essence a, de toute façon, été rationnée.

Ce scénario catastrophe d'une crue centennale, identique ou supérieure à la grande crue de référence de janvier 1910, la préfecture de Paris, la municipalité, l'Etat, les principaux organismes publics s'y préparent. Le 6 décembre, un exercice placé sous le nom de code "Evagglo" a eu lieu à grande échelle pour tester la réactivité des services concernés. Une équipe vient de partir à New York pour tirer les leçons de l'ouragan Sandy et confronter ce scénario à la réalité.

"Nous aurons une crue centennale. C'est une certitude. La seule inconnue, c'est quand ? La crue maximale durera entre dix et vingt jours, pendant lesquels on ne pourra rien faire, juste survivre. Le retour à la normale ne sera pas espéré avant quarante-cinq jours", assure Serge Garrigues, secrétaire général de la zone de défense de Paris, chargé de la protection des huit départements de la région francilienne.

 

 

A Paris, le 8 février. A Paris, le 8 février. | Reuters/CHARLES PLATIAU

 

 

Paris ne sera pas la seule touchée. En Ile-de-France, 500 communes seront atteintes ; 870 000 personnes pourraient être directement inondées pendant six à huit semaines, 60 000 entreprises impactées, 63 000 emplois détruits. Au total, 4 à 5 millions d'habitants seront concernés dans la région, dont un million seront privés d'électricité et 1,5 million d'eau potable. Le coût de cette crue de Paris est évalué entre 20 et 40 milliards d'euros.

 

De grands chantiers ont pourtant été réalisés pour protéger Paris. Quatre grands réservoirs artificiels en amont de la capitale ont été mis en service entre 1950 et 1990, permettant de réguler le débit de la Seine et de la Marne et d'abaisser de 50 à 70 cm le niveau de la Seine en cas de crue. Le lit du fleuve a été creusé. La municipalité s'est équipée de parapets amovibles pour rehausser les murets sur tout le linéaire des berges.

 

PARIS PLUS VULNÉRABLE QU'EN 1910

"En principe, la voie publique parisienne est ainsi protégée jusqu'à une hauteur de 8,62 m, c'est-à-dire au niveau de 1910", assure Eric Defretin, responsable du pôle de gestion de crises de la ville. Mais les experts considèrent que Paris n'est pas à l'abri d'une crue plus intense. En 1658, la Seine était montée jusqu'à 8,96 m ! Dans son livre Paris coule-t-il ? (éd. Fayard 2012), la géographe Magali Reghezza-Zitt souligne que les "murets des quais doivent être entretenus car avec le temps ils perdent leur étanchéité". En cas de crue, ils pourraient céder et devenir un danger plutôt qu'une défense. Car le débit du fleuve peut tout emporter sur son passage.

L'auteure relève un paradoxe : Paris est mieux protégé mais la ville est beaucoup plus vulnérable. En 1910, la capitale comptait tout juste deux millions d'habitants et une banlieue beaucoup moins urbanisée. "Paris n'était pas aussi développée en termes de réseaux et d'infrastructures et la ville n'était pas aussi dépendante des technologies et de l'électricité", confirme Anne Le Strat, adjointe au maire de Paris chargée de l'eau, de l'assainissement et de la gestion des canaux. Le sous-sol est devenu un gruyère, entremêlant galeries, tunnels, égouts, canalisations, parkings, caves, autant de passages dans lesquels l'eau s'infiltrera, fragilisant le sol, provoquant des effondrements.

Mais l'inondation sera aussi nourrie par la remontée de la nappe phréatique avec le risque de faire pression sur les murs des bâtiments et de provoquer des fissures. En temps habituel, des dizaines de pompes dans Paris rejettent de l'eau située sous les immeubles dans le fleuve, comme sous l'Opéra Garnier, sous le Musée du quai Branly ou dans le métro. Sans électricité, ces pompes ne fonctionneront plus.

 

 

Dans le quartier new-yorkais de Breezy Point, le 14 novembre après le passage de Sandy. Dans le quartier new-yorkais de Breezy Point, le 14 novembre après le passage de Sandy. | Reuters/ADREES LATIF

 

 

Les autorités travaillent sur un plan de secours et un scénario de retour à la normale, "la résilience". Le plan de crise sera activé quand les 5,50 m seront atteints sur l'échelle de référence, placée sous le pont d'Austerlitz. Le préfet prendra alors la commande des opérations. Deux cent cinquante partenaires de toute l'Ile-de-France ont été associés au dispositif. Les services publics, les mairies, les hôpitaux, la RATP, la SNCF ont élaboré des plans de continuité de leur activité.

 

MAINTIEN DES ASCENSEURS DANS LES MAISONS DE RETRAITE

"L'Etat civil, par exemple, doit fonctionner, même si la mairie est inondée, car les naissances et les décès ne s'arrêteront pas. Les ordures doivent être collectées, même si elles ne sont pas traitées. Il faudra assurer le maintien des ascenseurs dans les maisons de retraite", explique Eric Defretin. ERDF a prévu de redéployer mille groupes électrogènes pour assurer l'alimentation électrique des points stratégiques. Dans le secteur privé, les banques se sont engagées à installer des distributeurs mobiles d'argent liquide, la grande distribution de mettre en place des plateformes de vente des produits courants. L'armée sera mobilisée pour éviter les pillages.

 

Dans les premières heures de crise, les autorités françaises, s'inspirant de la gestion de Sandy à New York, comptent équiper les quartiers d'antennes relais mobiles pour communiquer avec les Parisiens grâce aux réseaux sociaux.

Pour protéger davantage Paris, des experts préconisent de construire un nouveau lac réservoir, la Bassée, pour absorber une crue de l'Yonne. Mais le débat, ouvert en 2001, n'a pas été tranché. Le projet est estimé à 500 millions d'euros. Une goutte d'eau par rapport au coût de la catastrophe annoncée.

 

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