En dessous du zéro absolu les gaz deviennent... ultra chauds!
Il est non seulement possible de créer des gaz théoriquement en dessous du zéro absolu, mais ceux-ci sont en plus extrêmement chauds. Ces résultats improbables ont été obtenus par une équipe allemande qui a poussé des atomes à leur plus haut niveau d'énergie, alors qu'ils étaient immobilisés par des lasers et un vide presque parfait.
Le zéro absolu pas si absolu que ça ? Des chercheurs de l’université Ludwig-Maximilian et du Max Planck Institut, tous deux à Munich, ont réussi à produire un gaz théoriquement en dessous de 0 degrés Kelvin, bien qu’il se révèle être extrêmement chaud ! Leur expérience habile est détaillée dans l’édition du 4 janvier de la revue Science.
La température d’un corps dépend du mouvement de ses atomes : plus ils sont rapides, plus le corps et chaud, plus ils sont lents, plus il est froid. Ainsi, quand les atomes sont immobiles, on atteint une température minimale de 0 degrés Kelvin (-273,15 degrés Celsius). La logique veut qu’il ne soit pas possible d’aller en dessous puisque les atomes sont déjà complètement stoppés. Alors comment être plus immobile qu’immobile ?
Inverser la distribution de Boltzmann
L’astuce tient dans ce que l’on appelle la distribution de Boltzmann, une formule qui prend en compte la température et permet d’étudier la répartition de l’énergie au sein d’un groupe d’atomes. Ces derniers ne se trouvent pas en même temps au même niveau d’énergie : en général l’énergie, et donc la chaleur, se réparti de manière à ce qu’il n’y ait que peu d’atomes très excités, tandis que les autres restent dans un état plus tranquille.
Ici les chercheurs ont créé un état inverse. Après avoir été ralentis aux frontières du zéro absolu à l’aide de lasers et d’une chambre à vide, les atomes d’un gaz se sont disposés en un motif en forme de treille. La majorité d’entre eux a alors reçu l’énergie nécessaire pour les faire passer à l’état le plus excité possible. Ainsi, dans le gaz utilisé, les atomes excités étaient devenus majoritaires et la distribution de Boltzmann s’est retrouvée inversée. La température est donc théoriquement devenue négative en degrés Kelvin.
La clé de l’énergie noire
"Une distribution de Boltzmann inversée est la marque des températures absolues négatives, et c’est ce que nous avons réussi à accomplir, clame le physicien Ulrich Schneider. Pourtant ce gaz n’est pas plus froid que 0 K, il est plus chaud. Il est même plus chaud qu’à aucune autre température positive : l’échelle de température n’est pas infinie, elle passe à la place à des valeurs négatives."
Loin de n’être qu’un simple pied de nez à Ludwig Boltzmann, cette prouesse ouvre la porte à l’étude du comportement de la mystérieuse énergie noire. Celle-ci contrebalance la tendance que devrait avoir l’univers à se rétrécir du fait de l’attraction. En dessous de 0 K, la pression du gaz devient négative et les atomes s’attirent au lieu de se repousser, sans pour autant s’effondrer sur eux-mêmes comme on pourrait s’y attendre. Les chercheurs espèrent trouver ainsi pourquoi l’univers lui non plus ne s’effondre pas malgré l’attraction des corps.