Un singe bouge le bras d’un autre… par la pensée
Des chercheurs ont mis au point une interface capable de convertir la pensée en action. Un espoir (réel mais encore lointain) pour les personnes paralysées.
Quand nous voulons effectuer un mouvement, la commande part de notre cerveau, pour être transmise à nos muscles, parcourant la moelle épinière. Quand cette dernière est endommagée, par un accident ou par la maladie, arrive la paralysie. La pensée ne parvient plus à diriger tout ou partie du corps. Alors que des chercheurs planchent, pour le moment sans succès, sur la possibilité de reconstituer ce précieux tissu, d'autres essayent de mettre au point un système informatique capable de la remplacer.
Parmi eux, une équipe américaine de l'université Cornell de l'Ithaca et de la Harvard Medical School de Boston vient de réussir un petit miracle : faire commander le bras d'un singe, temporairement paralysé, par un autre singe. Le tout en raccordant le bras de l'un au cerveau de l'autre via des électrodes et une interface informatique capable d'analyser l'activité cérébrale et de la convertir en influx nerveux.
Résultats extrapolables à l'homme ?
Selon la synthèse de leurs travaux publiés cette semaine dans la revue Nature, les singes, qui ont joué chacun leur tour le rôle du "maître" et du paralysé, devaient manipuler une manette et déplacer un curseur vers une cible sur un écran. Une configuration qui a été adoptée pour obtenir la simulation la plus proche d'une paralysie totale, où le cerveau est totalement déconnecté du membre à mouvoir.
En connectant le cerveau et les muscles d'un seul et même animal, le mouvement obtenu aurait pu être faussé par des signaux sensoriels provenant de contractions musculaires préservées. Résultats de l'expérience : dans pas moins de 84 % des cas, l'animal "maître" est parvenu à faire faire le mouvement juste au bras de son camarade paralysé. "Nous démontrons qu'un sujet peut contrôler un bras paralysé uniquement par sa pensée", souligne Maryam Shanechi, l'un des auteurs de l'étude.
La découverte est prometteuse et l'idée, à terme, est de créer une sorte de déviation permettant de contourner la blessure, un pont permettant la transmission du message envoyé par le cerveau. Pour autant, il faut se garder de tout triomphalisme et attendre avant d'affirmer que ces résultats sont extrapolables à lhomme. D'une part, parce que les muscles des patients paralysés depuis un certain temps sont considérablement affaiblis et, d'autre part, parce que les singes de l'expérience n'ont eu à effectuer que des tâches pour le moins rudimentaires.