Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Publié par Scientifique

http://s2.lemde.fr/image/2013/05/15/534x267/3237633_3_c813_la-population-de-wapitis-decline-dans-le-parc_76b7c3f8f3d3507cb3fb6997dc37c00f.jpg

Cela pourrait devenir un cas d'école de l'impact humain dans la chaîne alimentaire et ses répercussions insoupçonnées sur les écosystèmes : au Yellowstone, dans le Wyoming aux Etats-Unis, l'homme a introduit la truite grise, qui a mangé la truite fardée, nourriture des ours grizzly qui se sont alors rabattus sur les wapitis. Voilà la thèse inattendue d'une synthèse d'études publiée, mercredi 15 mai, dans la revue scientifique britannique Proceedings of the Royal Society B, alors que le célèbre parc américain s'interroge sur le déclin rapide de ses troupeaux de cervidés sauvages au cours des vingt dernières années.

Reprenons depuis le début. Les truites fardées du Yellowstone (Oncorhynchus clarki bouvieri), espèce native d'une poignée d'Etats comme le Wyoming, le Montana et l'Idaho, ont vu leur population rapidement décliner au sein du lac – qui représente 30 % du parc –, où elles viennent pondre chaque printemps. Leurs effectifs ont ainsi chuté d'au moins 90 % depuis 1990, quand on en dénombrait pas moins de 3,5 millions.

 

 INTRODUCTION ILLÉGALE DE TRUITES GRISES

En cause : l'introduction illégale et inexpliquée par l'homme, dans les années 1980, d'une autre espèce, des truites grises, aussi appelées ombles du Canada (Salvelinus namaycush). Ce carnivore, découvert pour la première fois dans le lac en 1994, se nourrit de crustacés, mollusques, larves et... d'autres poissons, notamment les truites fardées.

La sécheresse inhabituelle qui a réduit le débit des rivières au cours de la dernière décennie, ainsi que la prolifération d'un parasite, ont aussi contribué à affecter la population de truites fardées. "Mais au regard de l'importance de la prédation des truites grises comparée à ces facteurs secondaires, le déclin des truites fardées est largement la conséquence de l'action humaine", écrit le rapport.

 

ÉVOLUTION DU RÉGIME ALIMENTAIRE DES GRIZZLY

 

 

La dizaine de grizzlys qui vivent dans le parc national ont changé leur régime alimentaire depuis les années 2000.

 

 

Première répercussion dans la chaîne alimentaire : l'évolution du régime alimentaire de la dizaine de grizzlys qui vivent dans le parc national et qui se nourrissaient en grande partie de truites fardées et, occasionnellement, de quelques jeunes wapitis âgés d'une à deux semaines, lorsque les troupeaux passent l'été dans le parc avant de migrer vers les plaines extérieures l'hiver. Or, comme l'omble du Canada vit en eau profonde, contrairement à la truite fardée qui fréquente les petits cours d'eau, les grizzlys ne peuvent pas les pêcher facilement. Ils ont alors presque entièrement délaissé les poissons au profit de cervidés – dont les valeurs nutritives sont les mêmes selon les chercheurs.

Conséquence : au milieu des années 2000, les ours ont tué chaque année 41 % des jeunes wapitis évoluant dans le nord du parc – soit une bête tous les trois à six jours –, contre 12 % à la fin des années 1980. Le nombre d'ongulés tués par grizzy a lui aussi augmenté, preuve que cette prédation soutenue ne s'explique pas seulement par une augmentation du nombre d'ours dans la zone. La prédation des loups, réintroduits au Yellowstone et un temps accusés, "n'a pas été jugée comme suffisamment importante pour expliquer le déclin des wapitis", précise en outre l'étude. Au total, selon les chercheurs, ce changement de régime a entraîné une réduction du nombre de petits de 4 % à 16 % ainsi qu'une baisse de la croissance de la population locale de wapitis de 2 % à 11 %.

 

"Cela suggère que même dans un milieu aussi sauvage et protégé que le Yellowstone, une bourde humaine commise dans le milieu aquatique voici des années a des répercussions très profondes, forçant un prédateur omnivore à chercher de nouvelles sources de nourriture dans le milieu terrestre, explique Arthur Middleton, de l'université du Wyoming, principal auteur de l'étude. Ces conséquences écologiques étonnamment larges prouvent l'importance de supprimer les truites grises à l'intérieur du lac et d'empêcher de telles invasions ailleurs."

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article