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Publié par Scientifique

Quand et à quoi rêvons-nous? Une équipe internationale a déterminé quels signaux cérébraux correspondaient au moment du rêve et à son contenu, chez des volontaires, à partir de leur activité cérébrale.

Rien qu'en analysant votre cerveau, la science peut désormais savoir si vous rêvez ou non. Mieux, elle peut même déterminer les signaux correspondants au contenu de vos rêves! Telle est l'incroyable avancée qu'a faite une équipe de l'université de Wisconsin-Madison (Etats-Unis) et des universités de Lausanne et de Genève ainsi que l'IMT School Advanced Studies de Lucca (Italie), publiée dans Nature Neuroscience.

Jusqu'ici on estimait qu'une personne rêvait lorsqu'elle était dans une phase de sommeil dit paradoxal. En effet, depuis les années 1950, le temps du rêve est globalement assimilé à ce stade dit aussi sommeil REM (Rapid eye mouvement), qui se situe surtout en fin de nuit, caractérisé par une activité cérébrale intense proche de l'éveil et des mouvements oculaires rapides alors que le corps est paralysé. 

Mais les choses ne sont pas si simples. « Des études ultérieures ont montré que jusqu’à 70% de gens réveillés en sommeil non REM rapportaient des rêves, expliquent les auteurs de la nouvelle étude. A l’inverse, dans une petite mais constante minorité des cas, les sujets nient avoir rêvé lorsqu’ils sont éveillés en sommeil paradoxal ». Il fallait remettre l'ouvrage sur le métier.  

39 volontaires invités à dormir dans un laboratoire

Dans les différents centres de recherche américains, suisses et italiens, les spécialistes du sommeil ont donc équipé de casques d’électroencéphalographie (EEG) à 256 électrodes - qui mesure l’activité électrique des neurones du cortex - 39 volontaires priés de dormir, au laboratoire. Puis les dormeurs ont été réveillés plusieurs fois par nuit (entre 7 et 166 réveils sur plusieurs nuits!). A chaque fois, il leur a été posé la même question : étiez-vous en train de rêver?  

Les chercheurs ont ensuite compilé toutes les données et là, surprise : dans une zone à l'arrière du cerveau, la région parieto-occipitale, les variations des ondes de basse fréquence (1-4Hz) enregistrées étaient significativement associées à la présence ou l’absence de rêve! 20 secondes avant le réveil, une réduction de ces ondes est corrélée au rêve chez le dormeur. Alors que l’augmentation de ces ondes basse fréquence dans cette même zone, est associée à l’absence de rêve. Et ce, qu’il soit en sommeil REM ou non.

Pour la première fois, il serait donc possible de prédire vraiment si le dormeur rêve ou non en mesurant en temps réel l'activité cérébrale. Pour le démontrer, les chercheurs ont fait de nouveau dormir sept volontaires pendant trois nuits, qu’ils ont réveillés douze fois chacun. A chaque réveil, ils ont fait des prédictions en fonction de leur EEG. Résultat spectaculaire : "Nous avons pu prédire si quelqu’un rêve ou pas avec une haute précision (~ 90%), en surveillant l’activité de la zone corticale postérieure", assure le Dr Lampros Perogamvros, chef de clinique aux Hôpitaux Universitaires de Genève et chercheur à l'université de Genève et à l'université de Wisconsin, premier co-auteur de l’étude.

Le chercheur et ses collaborateurs sont allés encore plus loin, faisant l'hypothèse suivante : « De la même façon, en surveillant des régions spécialisées dans des contenus spécifiques on pourrait potentiellement prédire en temps réel, le contenu du rêve », affirme Lampros Perogamvros

"La connaissance fondamentale des mécanismes du rêve pourrait nous aider à mieux comprendre les mécanismes et les bases neuronales de la conscience"

Et c'est ce qu'ils ont fait. Cette fois les chercheurs ont recruté sept volontaires, entraînés à dormir et rêver en laboratoire, alors que leur activité cérébrale était enregistrée, puis les ont réveillé plusieurs fois par nuit. Observation : "Nous avons trouvé que l'activité cérébrale de haute fréquence (25-50Hz) était corrélée avec le contenu des rêves". Plus précisément, un rêve contenant des visages est associé à l'activation des ondes de haute fréquence dans une région dite fusiforme, de perception des visages, la même que pendant l'éveil. De même, la zone de perception des lieux, des mouvements ou des paroles est activée pendant le rêve comme durant l'éveil. Ainsi donc le cerveau du dormeur est un livre ouvert!  Prochaine étape  pour l'équipe :  vérifier si les prédictions de contenus sont pertinentes chez les dormeurs, dans une prochaine expérience. "La connaissance fondamentale des mécanismes du rêve pourrait nous aider à mieux comprendre les mécanismes et les bases neuronales de la conscience, conclut Lampros Perogamvros, et éventuellement comprendre la fonction des rêves, s'il y en a une".

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